une image de l’hybridité : grace wales bonner
“Être libre et agir ne font qu’un. Ceux qui agissent ensemble sortent de l’obscurité et révèlent à la fois qui ils sont et quel est le peuple auquel leur action commune donne naissance”
Lhuilier, D.et Pestre, É (2018).Introduction. La double face de l’exil. Nouvelle revue de psychosociologie, N° 25(1), 9-14.
Chez la créatrice Grace Wales Bonner, depuis ses créations d’école puis dans ces studios londoniens, on retrouve un peu de liberté, cette liberté née d’un exil choisi, exprimé par le vêtement. On retrouve un peu de la pensée d’Etienne Tassin. Ce professeur et chercheur a développé une réflexion sur le phénomène de l’exil. Un phénomène comme visage d’une certaine nature humaine, et d’une certaine idée de la liberté. La liberté par l’action permet trois choses, selon lui : une naissance, une communauté et une liberté. Une naissance comme un éveil à soi-même, une action “en relation entre acteurs, sans médiation par les choses" (matérielles), synonyme de communauté et enfin comme le déploiement “d’un espace d’apparition pour la liberté”.
Il est philosophe, chercheur. Elle est créatrice, chercheuse. Les médias lui attribuent aujourd’hui le nom de “chercheuse créatrice”. Elle confie avoir “besoin de participer à ces discussions intellectuelles et créatives qui (la) motivent pour créer des vêtements”. Si elle souhaite faire entendre différentes voix par la voie créative, son discours par la mode est une application de sa pensée plurielle : une alliance de la tradition anglaise du costume, dit tailoring, et l’art africain et afro-américain. Elle utilise le vêtement comme médium, vecteur de sa pensée, plurielle.
Une collection devient un espace d’exposition, à l’image de la collection Autumn/Winter2015 Men Ebonics. C’est une réflexion sur les rapports de pouvoir à l’époque des conquêtes coloniales du XIXe siècle, et une mise en avant de cultures traditionnellement minorisées et enchaînées dans une hiérarchie de dominations. Une réflexion, une exploration sur l’identité. Une identité hybride, la sienne, sans doute.
Une collection est aussi une réflexion sur les caractères féminin et masculin attribués au vêtement.
Sur la dernière collection Autumn/Winter/2025 Women, le vestiaire femme est une nouvelle fois chic, décontracté et masculin.
Finalement, comme le disait Edouard Glissant, “nous avons rendez-vous là où les océans se rencontrent”. Nous avions rendez-vous.
© Courtesy of Wales Bonner © Courtesy of Wales Bonner